La digitalisation de la fonction finance

Un enrichissement nécessaire des compétences pour aller vers la DAF « Data Centric »

Le déploiement des technologies digitales, qui repose sur la maîtrise et l’exploitation des données de toutes natures, constitue depuis plus de vingt ans l’un des moteurs principaux d’évolution des organisations. Ce phénomène bouleverse les modes de travail traditionnels, les emplois et les compétences professionnelles.

Au cœur de l’entreprise « data-centric », les directions financières sont directement touchées par cette lame de fond. Elles voient émerger de nouveaux rôles et métiers, associés à des responsabilités spécifiques, qui deviennent incontournables aux côtés de ceux des comptables, des trésoriers ou des contrôleurs de gestion : « data owners » chargés de la gouvernance des données clés, « chefs de projet » dédiés à la transformation digitale, « business analysts » travaillant de concert avec les opérationnels, « data scientists » responsables des modèles de prévision…

Une évolution des métiers de la DAF vers plus de conseil et de transversalité…

Cette digitalisation des activités fournit l’opportunité aux directions financières de passer d’un rôle de producteur de chiffres et d’enregistrement comptable à celui de véritable Business Partner de l’entreprise :

  • – D’une part, la dématérialisation systématique des processus et l’automatisation ou la robotisation des tâches à faible valeur ajoutée permet la réalisation de gains de productivité considérables ;
  • – D’autre part, le déploiement d’outils de Big Data, d’Intelligence artificielle, de navigation intuitive dans les données (Data Viz) renforce de manière spectaculaire les capacités d’analyse et de prévision.

Le temps ainsi libéré doit être mis à profit pour fournir des services à plus forte valeur ajoutée aux clients internes comme aux partenaires externes, sous la forme de conseil et d’aide à la décision opérationnelle, de prévisions de plus en plus fiables, d’indicateurs clés de performance accessibles à la demande, de détection des réserves de productivité ou de pilotage de la stratégie. Les acteurs de la Finance peuvent alors participer pleinement aux plan d’amélioration continue, comme « business partners » de l’entreprise, grâce à leur capacité à identifier et à mettre en œuvre les leviers d’action pertinents.

… requérant de nouvelles compétences orientées projet et SI

En pratique, l’exercice de ces nouvelles fonctions nécessite des compétences spécifiques, complémentaires mais distinctes des compétences purement financières.

En raison de la prégnance du SI, les directions financières doivent naturellement enrichir leurs équipes avec des profils maîtrisant les compétences technologiques :

  • – Compréhension du socle technologique sous-jacent aux outils digitaux ;
  • – Capacité à travailler en étroite collaboration avec les acteurs IT et les data scientists lors de l’élaboration des solutions ;
  • – Capacité à traiter et assurer la gouvernance les données.

Mais ces compétences technico-fonctionnelles doivent aussi être accompagnées de « soft skills », assurant la capacité à :

  • – Travailler en mode projet avec des équipes pluridisciplinaires ;
  • – Evaluer les risques et à conduire une stratégie d’accompagnement du changement ;
  • – Développer une vision transversale, intégrant SI, processus et management, à orienter les efforts sur les cas d’usage les plus pertinents ;
  • – Organiser le travail en mode décentralisé (télétravail, colloboratif) ;
  • – Maintenir et valoriser l’expertise « humaine » et le sens critique face aux données…

Il s’agit en fin de compte d’un changement culturel majeur pour les directions financières. Le succès dépend de la capacité à attirer, intégrer et faire grandir en leur sein des profils de plus en plus hétérogènes en termes de parcours professionnel, de motivations et de compétences.

Tout au long de ce chemin, il faudra aussi répondre aux inquiétudes légitimes des acteurs en place : crainte du déclassement des métiers traditionnels, de la prévalence du tout quantitatif, de la « déshumanisation » des activités. Pour cela, les directions financières doivent nécessairement activer des démarches formation, de gestion des compétences et de conduite du changement.

Mais elles doivent aussi réfléchir en amont à leur roadmap stratégique et à leur positionnement souhaité dans l’organisation. Seule la définition de cette cible leur permettra d’anticiper et de maîtriser les évolutions inéluctables de leurs métiers, et de transformer cette contrainte en une opportunité pour leurs collaborateurs.